Le samedi 25 avril 2020.
Tout c' qu'est dégueulasse porte un joli nom...
"La bonne n'est pas sage mais on la garde encore..."
L'idée m'est venue vendredi matin en pédalant pendant une petite sortie sur le vieux VTT que j'ai remis en état (dans la limite des conditions de confinement, bien sûr !) : Pourquoi ne pas faire mon 200 du mois d'avril sur un home-trainer ? Si j'avais possédé une telle machine, sans doute y aurais-je pensé plus tôt.
Alors j'ai demandé à mon copain Patrick de me prêter son engin et ainsi samedi matin je serai prêt pour un nouveau Dodécaudax !
Pour pouvoir vérifier mon kilométrage, j'ai installé le capteur de mon compteur sur la roue arrière...
... et le compteur lui-même sous la selle.
Samedi matin, je commençai l'épreuve, c'en fut une... à 6H35. J'avais avalé un petit déjeuner copieux et préparé quelques disques pour rouler en musique.
Il fut tout d'abord difficile de trouver un bon rythme, voici bien longtemps que je n'ai pas utilisé un tel accessoire. Mais bien vite j'ai trouvé la cadence en moulinant beaucoup comme à mon habitude.
La suée arriva rapidement, il me fallut aller chercher une serviette. J'entrouvris également la porte de la véranda car les vitres se couvraient de buée, signe que je dépensais beaucoup d'énergie. On pourrait produire de l'électricité ainsi...
J'ai commencé mon voyage en écoutant Gérard Pierron qui chante Gaston Couté, édité par la grande maison de disque "Saravah" chère à Pierre Barouh. Me voici sur les routes de la Beauce à la fin du XIXème siècle. Même dans les longues lignes droites beauceronne j'adorerais rouler aujourd'hui...
Que du bon, que du beau sur ce disque ! En particulier, cette magnifique chanson. Cette randonnée commence bien finalement.
A la fin de chaque disque, j'ai décidé que je ferais une pause et là après 18 kilomètres je m'arrête pour me détendre les muscles. L'effort n'est pas vraiment le même que sur un "vrai vélo". Il y a moins de changement de rythme et il est difficile de se mettre en danseuse. Je m'arrête également pour un petit ravito et une petite boisson même si j'ai deux bidons de thé au miel près de mon vélo.
Pour ma deuxième étape, je suis accompagné par les chansons de Leprest. Higelin, Sansévérino, Jamait, Guidoni, Fugain, Lavoie et d'autres rendirent hommage voici plus de 10 ans au Grand Allain Leprest dans deux disques intitulés "Chez Leprest".
J'avoue avoir un faible pour cette interprétation d'Olivia Ruiz. Il y a également une version de Jean-Louis Foulquier qui est très belle.
Tout c' qu'est dégueulasse porte un joli nom...
Gageons qu'aujourd'hui Leprest aurait ajouté à sa liste : CORONAVIRUS, BOLSONARO, AMAZON, CONFINEMENT, Masque FFP2...
J'ai parcouru 40 kilomètres en un peu moins de deux heures et je commence à m'emmerder ! Malgré la bonne musique... Il me faut un dérivatif. Je connais des cyclistes confinés qui regardent la télé, d'autres qui échangent sur les réseaux sociaux. Moi, je choisis de lire... On ne se refait pas !
Je commence cette troisième étape en musique... Encore un bon choix.
"J'ai plaqué mon chêne
Comme un saligaud
Mon copain le chêne,
Mon alter ego,
On était du même bois
Un peu rustique, un peu brut (...)"
Ou encore
"Chez Jeanne, la Jeanne
Son auberge est ouverte aux gens sans feu ni lieu
On pourrait l'appeler l'auberge du Bon dieu (...)"
Du grand Renaud au service de Brassens. Mais j'ai un faible pour celle-là :
Parlez-moi de la pluie...
Cela serait bien en effet, moins monotone...
et puis un peu de vent aussi...
Jamais content !
Cela serait bien en effet, moins monotone...
et puis un peu de vent aussi...
Jamais content !
Pour la lecture, j'ai choisi le dernier numéro de ZADIG, la revue de Fottorino - tiens un cycliste. Avec le Un, la Revue AMERICA et bientôt LEGENDE, il vient de réinventer une certaine presse papier. Merci, monsieur.
Pendant quelques instants, je roule en forêt de Montargis suivant les pas des gardes forestiers. C'est une bonne idée la lecture pendant cette épreuve, le temps passe plus vite et le voyage est double. J'arrive ainsi à la fin du disque de Renaud. J'ai parcouru 68 kilomètres sans quitter ma véranda et il est 9H30, l'heure de ma troisième pause.
Je reprends "la route" en compagnie de la tribu Perret. Cet hommage à Pierre Perret initié et organisé par les Ogres de Barback fut un grand spectacle auquel nous avons assisté voici quelques mois à la Salle Pleyel à Paris. Le 20 mars 2020, nous devions assister au concert fêtant les 25 ans de scène des Ogres, il fut annulé pour les raisons que chacun connait !
Magnifique disque... J'avoue encore un faible pour Olivia Ruiz, avec Mouss, Hakim et Lo Barrut qui interprètent "Je suis de Castelsarrasin".
Pendant quelques instants, je roule en forêt de Montargis suivant les pas des gardes forestiers. C'est une bonne idée la lecture pendant cette épreuve, le temps passe plus vite et le voyage est double. J'arrive ainsi à la fin du disque de Renaud. J'ai parcouru 68 kilomètres sans quitter ma véranda et il est 9H30, l'heure de ma troisième pause.
Je reprends "la route" en compagnie de la tribu Perret. Cet hommage à Pierre Perret initié et organisé par les Ogres de Barback fut un grand spectacle auquel nous avons assisté voici quelques mois à la Salle Pleyel à Paris. Le 20 mars 2020, nous devions assister au concert fêtant les 25 ans de scène des Ogres, il fut annulé pour les raisons que chacun connait !
Magnifique disque... J'avoue encore un faible pour Olivia Ruiz, avec Mouss, Hakim et Lo Barrut qui interprètent "Je suis de Castelsarrasin".
Superbe. Je me souviens de notre passage à Castelsarrasin lors d'un voyage vers les Pyrénées en 2016. Je me souviens en particulier de deux pique-nique au bord du canal, l'un dans le sens nord-sud, l'autre en remontant.
ON peut voir un superbe documentaire sur cet hommage en suivant le lien suivant :
Merci Pierrot, Merci les Ogres, Merci François Morel, merci Didier Wampas, Merci Didier Wampas, Merci à tous les autres !
Pendant le concert, je continue à lire. Et le hasard faisant bien les choses, voilà t'y pas que je tombe sur Philippe Delerm évoquant son enfance, dans Zadig toujours.
Et il passa ses vacances d'été chez ses grands-parents près de Garonne au pays de Pierre Perret ou presque ! et puis il parle de vélo...
"(...) La grande liberté, je l'ai découverte à bicyclette. Au-delà les chemins d'eau, il y avait des collines. Saint Paul d'Espis,Saint Jean de Cornac, Moissac, Bourg de Visa, Lauzete, Pommevic, Lalande. Tous ces noms de villages chantent encore en moi comme une sorte de possession du monde. Je partais chaque jour, dès le début de l'après-midi. Ma mère me disait d'attendre qu'il fasse moins chaud, mon père désapprouvait cette sueur inutile que j'allais verser - pour lui, tout effort se devait d'être sérieux.(...)"
Je me prends à rêver moi aussi de grands espaces et de soleil. Il va bientôt me chauffer à travers la verrière.
"(...) Parfois j'y roulais comme un fou, m'inventant des commentaires du Tour de France où Poulidor enfin dépassait Anquetil, sur les méandres du goudron fondu."
Ma moyenne augmente, Poulidor et Anquetil ! il faut que je sois à la hauteur...
J'approche des 100 kilomètres, il est 10H45, ma moyenne est supérieure à 25km/h, jamais je ne roule si vite sur un 200...
Vendredi, après avoir récupéré le home trainer de l'ami Patrick, je suis allé faire quelques commissions à vélo. J'ai même été contrôlé par la Gendarmerie Nationale... j'étais en règle. Circulez !
J'ai acheté, en plus du ravitaillement pour une semaine, au moins, le dernier numéro de la revue 200
Yann Kerninon y raconte son 200 sur un home trainer, je me doutais bien que d'autres auraient cette idée saugrenue.
Je commence cette cinquième étape en lisant cet article.
Je commence cette cinquième étape en lisant cet article.
"Renoncer à une idée idiote serait forcément une défaite."
A graver sur le cadre de mon vélo ?
"(...)Les idées idiotes méritent de vivre. Elles touchent notre enthousiasme, notre coeur, notre corps. Quelque chose de notre enfance aussi. C'est donc important. Les belles idées idiotes, c'est la vie même ! En réaliser une, c'est toujours une façon de combattre la mort(...)"
"(...)Les idées idiotes méritent de vivre. Elles touchent notre enthousiasme, notre coeur, notre corps. Quelque chose de notre enfance aussi. C'est donc important. Les belles idées idiotes, c'est la vie même ! En réaliser une, c'est toujours une façon de combattre la mort(...)"
Pendant ce temps, Juliette Gréco chante. Elle chante Brel et Piaf, Gainsbourg et Salvador, Leforestier et Lavilliers. J'adore pour "La folle complainte" de Charles Trénet :
"La bonne n'est pas sage mais on la garde encore..."
A 11H50, après 125 kilomètres à rouler sur place, je termine cette cinquième étape.
Puis je repars avec en fond sonore ce disque de Nougarro enregistré au théâtre des Champs Elysées les 26 & 27 juin 2001. Je feuillette le dossier de Zadig consacré à "Ces maires qui changent la France" et lis l'article que Michel Pastoureau consacre au vert du printemps. Et tout ceci me mène à l'heure du repas après avoir écouté "Le coq et la pendule" mais pas de coq au vin ce midi...
Après une bonne douche et un changement de tenue, je peux avaler un bon repas et une bonne bière. C'est fatigant un 200...
Je reprends mon périple avec Nougarro.
"Quatre boules de cuir...
tournent dans la lumière...
BOXE... BOXE..."
Je choisis cette chanson car depuis quelques semaines une de mes occupations favorites est de me plonger dans mes vieux journaux sportifs et à la une d'un Miroir sprint de 1949 (n° 177 du 31 octobre 1949), j'ai découvert cette illustration de Paul Ordner qui rend hommage à Marcel Cerdan décédé quelques jours plus tôt dans un accident d'avion.
Il y a ainsi des personnages qui ont marqué leur époque. Cerdan fut des ceux-là. Et l'image est vraiment superbe. Dans un autre registre que Pellos, Ordner fut un grand illustrateur du sport en ces années d'après-guerre.
A 14H00, mon compteur affiche 168 kilomètres et après une petite pause, j'attaque la dernière étape de ma randonnée...
Je choisis ce voyage au temps du Tour 1934. Choix guidé par un article de la revue 200 consacré à René Vietto, héros malchancheux de ce Tour de France. Il y a ainsi des épisodes légendaires dans l'histoire du Tour. Cela devient même "une tarte à la crème de la fameuse "légende" du Tour, cette fable vraie qui a aussi son côté détestable -surjouée, démultipliée, grandiloquente, fabriquée aussi(...)" (Alain Puiseux - Revue 200 Printemps 2020)
Aussi l'auteur ne part-il pas à la suite de Vietto sur les routes du Tour. Il part, à vélo, entre Nice et Marseille à la recherche d'un orteil amputé de René Vietto et qui serait précieusement conservé dans un mystérieux bocal. Que personne en fait n'a jamais vu. C'est un peu l'histoire de l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours...
Je ne connaissais pas cette histoire mais il s'avère que quelques jours auparavant, j'avais lu dans un vieux Miroir sprint (encore) la version que donnait Vietto de son "sacrifice" au bénéfice d'Antonin Magne en 1934. Il s'agit du numéro spécial d'avant Tour de France de juin 1950.
En ce qui concerne ma randonnée, les airs d'accordéon de cette année 1934 sont bientôt couverts par le rap qu'un voisin confiné écoute... très fort. Les derniers kilomètres sont ainsi difficiles même après avoir refermé la porte de ma véranda...
Je peux enfin mettre fin au supplice : 200 bornes au compteur, pas un décamètre de plus ! Il est presque 16H00. J'ai pédalé pendant 8 heures environ et je suis content d'en avoir terminé. Mon prochain 200, je le ferai sur la route bien sûr. Sans musique et sans lecture mais EN LIBERTE...
Puis je repars avec en fond sonore ce disque de Nougarro enregistré au théâtre des Champs Elysées les 26 & 27 juin 2001. Je feuillette le dossier de Zadig consacré à "Ces maires qui changent la France" et lis l'article que Michel Pastoureau consacre au vert du printemps. Et tout ceci me mène à l'heure du repas après avoir écouté "Le coq et la pendule" mais pas de coq au vin ce midi...
Après une bonne douche et un changement de tenue, je peux avaler un bon repas et une bonne bière. C'est fatigant un 200...
Je reprends mon périple avec Nougarro.
"Quatre boules de cuir...
tournent dans la lumière...
BOXE... BOXE..."
Je choisis cette chanson car depuis quelques semaines une de mes occupations favorites est de me plonger dans mes vieux journaux sportifs et à la une d'un Miroir sprint de 1949 (n° 177 du 31 octobre 1949), j'ai découvert cette illustration de Paul Ordner qui rend hommage à Marcel Cerdan décédé quelques jours plus tôt dans un accident d'avion.
Il y a ainsi des personnages qui ont marqué leur époque. Cerdan fut des ceux-là. Et l'image est vraiment superbe. Dans un autre registre que Pellos, Ordner fut un grand illustrateur du sport en ces années d'après-guerre.
A 14H00, mon compteur affiche 168 kilomètres et après une petite pause, j'attaque la dernière étape de ma randonnée...
Je choisis ce voyage au temps du Tour 1934. Choix guidé par un article de la revue 200 consacré à René Vietto, héros malchancheux de ce Tour de France. Il y a ainsi des épisodes légendaires dans l'histoire du Tour. Cela devient même "une tarte à la crème de la fameuse "légende" du Tour, cette fable vraie qui a aussi son côté détestable -surjouée, démultipliée, grandiloquente, fabriquée aussi(...)" (Alain Puiseux - Revue 200 Printemps 2020)
Aussi l'auteur ne part-il pas à la suite de Vietto sur les routes du Tour. Il part, à vélo, entre Nice et Marseille à la recherche d'un orteil amputé de René Vietto et qui serait précieusement conservé dans un mystérieux bocal. Que personne en fait n'a jamais vu. C'est un peu l'histoire de l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'ours...
Je ne connaissais pas cette histoire mais il s'avère que quelques jours auparavant, j'avais lu dans un vieux Miroir sprint (encore) la version que donnait Vietto de son "sacrifice" au bénéfice d'Antonin Magne en 1934. Il s'agit du numéro spécial d'avant Tour de France de juin 1950.
En ce qui concerne ma randonnée, les airs d'accordéon de cette année 1934 sont bientôt couverts par le rap qu'un voisin confiné écoute... très fort. Les derniers kilomètres sont ainsi difficiles même après avoir refermé la porte de ma véranda...
Je peux enfin mettre fin au supplice : 200 bornes au compteur, pas un décamètre de plus ! Il est presque 16H00. J'ai pédalé pendant 8 heures environ et je suis content d'en avoir terminé. Mon prochain 200, je le ferai sur la route bien sûr. Sans musique et sans lecture mais EN LIBERTE...
Bonjour Jean-Pierre,
RépondreSupprimerJ'aurais volontiers essayé de t'accompagner dans ton 200 km sur home-trainer... Bon, je me serais sans doute retrouvé en "chasse-patates" au bout d'une petite heure... au pays des "mangeux d'terre"!
La "bande son" est superbe, de Gaston Couté à Nougaro en passant par Leprest, je valide absolument tout.
Les lectures aussi, l'hommage au Roi René cher à Luis Nucera et la très intelligente revue Zadig.
Le confinement a ses vertus!
Bien amicalement
Jean-Michel
Bonjour.
RépondreSupprimerMerci pour cette belle bal(l)ade musivale... Voyage dans le temps et dans la musique... Y'a que géographiquement qu'on a moins bougé... Mais c'est pour bientôt...