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Mon 200 du mois d'avril : Poisson d'avril ? Deuxième partie

Réviser les fables de La Fontaine en parcourant à vélo, virtuellement, les routes du bas de l'Aisne, ce sera Mon 200 du mois d'avril 2020, une date qui fera date... Après avoir évoqué dans un précédent billet les 9 premières fables de mon périple, me voici sur la route de Condé en Brie.

Je quitte le Loup de Montigny lès Condé, et son compère le Chien, par une descente fort pentue pour gagner la vallée du Surmelin.
Condé en Brie est un petit bourg fort calme. S'il semble avoir été cossu, aujourd'hui sa traversée présente un visage triste  et presque déprimant.
Le long de la Dhuys, je m'approche du lavoir communal qui semble avoir peu changé en un siècle ou plus, ou moins.
Il est moins occupé que jadis, même quand il n'y a pas de confinement...
Ici est illustrée cette fable qui nous parle... douloureusement :

"Un mal qui répand la terreur,
Mal que le Ciel en sa fureur
Inventa pour punir les crimes de la terre (...)

Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés(...)
Mais chacun s'exonère -le Lion, le Tigre, l'Ours, le Loup etc- d'une quelconque responsabilité (Ne parlons même pas de culpabilité...) et c'est l'âne, ce pelé, ce galeux qui est reconnu coupable de tous les maux.

Selon que vous serez puissant ou misérable,
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.
Je crains, hélas, que cette morale ne s'applique dans quelques semaines ou quelques mois...
Et je repars pensif le long de la Dhuys vers la vallée du Surmelin, dans la direction opposée à Château Thierry, je zigue et je zague aujourd'hui, pour gagner le village de Baulne en Brie.

Encore une jolie vallée que celle qui permet de suivre le cours du Surmelin. Monsieur de La Fontaine devait sillonner ces petits pays lorsque qu'il occupait sa charge de maître des Eaux et Forêts. Dans le conte "Les amours de Psyché et Cupidon", il décrit un paysage qui pourrait être celui-ci :
"Cette vallée était spacieuse, plus longue que large, ceinte de coteaux merveilleusement agréables. Ils étaient mêlés de bois, de champs, de prairies et d'habitations, qui se présentaient d'un long calme."
Cela ressemble  à ce que j'ai sous les yeux sur cette route d'Orbais l'Abbaye si souvent empruntée. Nous y étions passés avec Mado et Michel en mai 2013 lors d'une randonnée permanente Brie-Champagne :
 Randonnée Brie-Champagne 2013 -1-
Randonnée Brie-Champagne -2- 
En 2002, nous étions venus, avec Pascal, voir le passage du Tour de France sur cette route. C'était une étape contre-la-montre par équipes qui allait d'Epernay à Château Thierry. Ce fut du grand spectacle. Nous nous étions postés à la sortie de Condé sur un talus, laissant nos vélos dans le fossé en contrebas. Une famille s'était installée près de nous. En attendant les coureurs, les enfants turbulents sautaient, se chamaillaient, hurlaient, se faisaient enguirlandés par des parents... débordés. Les sauts dans le fossés des bouts de chou nous firent craindre le pire pour nos machines et nous dûmes les mettre hors d'atteinte des petits vandales. au passage de la caravane publicitaire ce fut une curée sans nom pour récupérer qui un sachet de bonbons Haribo, un saucisson Cochonou, un Stylo Sécurité routière. Les cris redoublèrent, les coups pleuvèrent : 
"Il se faut entraider" n'était pas la devise de cette famille...
Mais je cause, je cause, et je pédale, je pédale, et j'arrive à Baulne.

Au lavoir du village, cette fable célèbre est illustrée. Chacun connaît l'histoire.

Perrette, sur sa tête ayant un Pot au lait
            Bien posé sur un coussinet,
Prétendait arriver sans encombre à la ville.
Légère et court vêtue elle allait à grands pas ;
Ayant mis ce jour-là pour être plus agile
            Cotillon simple, et souliers plats.

Mais cela ne se passa pas comme prévu, Perrette trébucha et le pot au lait se brisa !

"Adieu, veau, vache, couvée"

Cela pourrait être également une des leçons pour notre "sortie de crise"...
Avant d'entamer, l'ascension de la longue et raide bosse qui doit me faire quitter la vallée du Surmelin, je passe près du mur du souvenir érigé, face à la mairie, au début des années 2010 en souvenir des déportés. Que le confinement parait doux quand on songe à ça...
Mais cette bosse dans le vignoble est vraiment difficile, surtout avec un pignon fixe et même virtuellement. 
Je me souviens m'être lamentablement étalé ici, près de cette table d'orientation lors de ma première montée. J'avais voulu changer de développement à l'endroit ou la pente est la plus raide, ma chaîne avait déraillé et je m'étais vautré sur la route... Un couple d'automobilistes qui se promenait dans les vignes s'était gentiment précipité dans ma direction pour prendre de mes nouvelles. J'avoue que je m'étais senti un peu ridicule, les deux pieds en l'air, empêtré dans ma machine, crachant des jurons contre mon vélo (qui n'y était pour rien), contre cette p... de côte (qui n'y était pour rien non plus !) et contre moi surtout. La Fontaine en aurait fait une fable, sans doute.
Après cette montée, il a bien sûr fallu redescendre pour atteindre la vallée d'un deuxième (après la Dhuys) petit affluent du Surmelin : le ru du Rosset qui prend sa source dans la Marne voisine. Me voici à La Chapelle Monthodon.
Près de la monumentale église de la Nativité-de-la-sainte-Vierge se trouve le lavoir où trône une statue en bronze illustrant la fable "Le coq et le renard"
La publicité ne pouvait pas manquer d'utiliser les fables pour ses réclames dans les journaux bien sûr mais également grâce à des objets publicitaires comme ce buvard à la gloire de biscottes LUC. Qui utilise encore des buvards ? Les biscottes Luc existent-elles encore ? Distribué des buvards et des biscottes sur la route du Tour de France ????
"Sur la branche d'un arbre était en sentinelle
Un vieux Coq adroit et matois"
Ainsi débute cette fable peu connue, de moi en tout cas. On peut remarquer que l'illustrateur a juché son coq sur un banc... Passons.
Le Renard fidèle au caractère que lui prête La Fontaine essaie de duper le coq par la ruse. Mais le Coq n'est pas dupe et il réussit à faire fuir le Renard grâce un judicieux stratagème. La morale est limpide :

Car c'est double plaisir de tromper le trompeur
Ici encore, le fabuliste imite Esope : "Je chante les héros dont Esope est le père." écrivit-il dans sa dédicace au Dauphin. En préambule à ce premier recueil de fable, il publia d'ailleurs une "Vie d'Esope le Prhygien".
"La Fontaine reprend la vie légendaire du poète grec telle qu'il a pu la lire. Rien n'est sûr, mais qu'importe, on sait si peu de choses d'Esope... à peine est-on certain de son existence." ("Tout sur La Fontaine" 116,  Martine Pichard - Ed. Cours toujours)
La route qui suit cette petite vallée du Rosset est fort roulante. Sur ces coteaux se déroulèrent des combats meurtriers lors de la deuxième bataille de la Marne en juillet 1918.

Dans le village de Saint Agnan (c'est bizarre, pas de fable ici ?), un discret mémorial évoque cette bataille qui vit se battre des soldats allemands contre des français et des américains.
Un panneau explique le déroulement des combats et énumère la liste des jeunes hommes tombés sur ces ccoteaux. Quelques semaines plus tard, le monde devait affronter la terrible épidémie de grippe (dite espagnole) qui tua plus dans le monde que la guerre elle-même (On peut lire à  ce sujet un article du Canard enchaîné du 18 mars 2020, le canard enchainé avait alors 3 ans et comptait 4 pages comme depuis 2 semaines...).
Canard enchainé - 25 mars 2020
Comme en 14 ?
(On peut retrouver Chapatte et ses confrères dessinateurs en ligne sur le site du Canard enchainé)
Mais ça roule, la pente est légère mais favorable et j'avale les kilomètres. 

A Celle lès Condé, je prends à droite et passe près de la fontaine, une des seules de la région où il n'est pas encore écrit : "Eau non potable", pour filer vers Connigis.


Le village est toujours aussi calme et je redécouvre "Le renard et le bouc". 
Le château de Connigis
Dans le livre de "Fables choisies" que je dévorais enfant, au sens figuré bien sûr, une image me fascinait . Celle du Renard perché sur les cornes du bouc pour sortir du puits, cela me paraissait extraordinaire.
L'image ressemblait à celle-ci, inspirée de Gustave Doré, mais on ne voyait que les cornes du bouc, le puits était plus étroit, les couleurs plus sombres et je me demandais comment ce pauvre bouc allait bien pouvoir se sortir de là.

"En toute chose, il faut considérer la fin."
Telle est la morale que tire La Fontaine de sa fable... J'avoue qu'enfant déjà, je préférais celle de "L'Ane et le Chien" : 
"Il se faut entraider."
Le Renard passait à mes yeux d'enfant pour un fieffé salaud ! C'est dit.
Je traverse à nouveau le Surmelin, jolie petite rivière de 40 kilomètres environ qui prend sa source aux alentours de Montmort Lucy dans le département de la Marne pour se jeter dans la Marne (la rivière) à Mézy Moulins. 


Et j'arrive au village de Saint Eugène.
J'ai déjà parlé sur un autre blog du tympan sculpté de l'église de Saint Eugène. 

Il fut un temps où la guerre des biscottes faisait rage, par buvards interposés !

Aujourd'hui, je suis ici pour évoquer la fable "Le Loup et l'Agneau", encore un "tube" de La Fontaine et un cauchemar pour de nombreux enfants sans doute à jamais dégoutés du gigot !

La raison du plus fort est toujours la meilleure :
            Nous l'allons montrer tout à l'heure

La morale se trouve au début de la fable, ce qui tue le suspense... Pourtant l'agneau va essayer de sauver sa peau en argumentant. Mais que peut la parole contre la force ?


Car vous ne m'épargnez guère,
            Vous, vos Bergers et vos Chiens.

On me l'a dit : il faut que je me venge.

Là, on ne peut pas lui donner tort, au loup. Sauf que ce Loup, n'est pas un vrai loup. 
 Un peu dégouté par tant de mauvaise foi, je prends la route de Crézancy sans m'arrêter à l'hôtel de la gare qui fut fermé bien avant le confinement.
Je ne prends pas la côte qui mène directement à Courboin, une des plus belles que je connaisse dans le secteur ( et j'en connais !) car il me faut visiter d'autres lavoirs avant. C'est de la dentelle ce circuit, je l'ai dit en préambule.
Pour l'instant, je roule sur la route qu'emprunte le BRM 200 de l'Audax Club Parisien chaque année (sauf en 2020) et j'ai faim. Un des désavantages des randonnées cyclotouristes virtuelles, c'est qu'elles nous privent des casse-croûte aux bons produits locaux : pâté Hénaf, Babybel...
Après tout, j'ai jusqu'au 30 avril pour boucler mon 200 du mois d'avril, alors : A TABLE !

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