Mardi 23 juin 2020
J'avais choisi de ne pas inclure certaines étapes du circuit FABULIS à ma rando virtuelle du mois d'avril. En cette fin du mois de juin, j'ai décidé de faire une nouvelle balade vers ces dernières fables que j'avais négligées. Cela m'a permis de faire une belle randonnée ensoleillée vers la vallée de la Marne et le Tardenois, entre Château Thierry et Reims.
En ce mardi 23 juin, je suis parti pour la vallée de la Marne par les routes calmes de Vendières et Rozoy Bellevalle où 9 éoliennes tournent, tournent au gré du vent depuis quelques années maintenant. Un de ces moulins était à l'arrêt. D'habitude, cela n'attire pas mon attention, mais aujourd'hui, j'ai remarqué une corde qui descendait d'une pale et je me suis arrêté pour admirer... l'acrobate ! Et dire que moi, j'ai le vertige dès que je dois faire deux pas au-dessus du vide, même à 3 mètres de hauteur. Va-t-il descendre le long de la corde jusqu'au sol ? Le moulin va-t-il se remettre à tourner avant que l'Acrobate s'en aille ? Chapeau l'artiste... Me voici à pied d'oeuvre dans la vallée de la Marne et si je n'ai pas trouvé traces des fables "Le marchand, le gentilhomme, le pâtre et le fils du roi" et "le loup et la cigogne" à Chartèves et Jaulgonne, j'ai plus de chance à Barzy ou plutôt au hameau de Marcilly qui se trouve sur la route de Dormans.
C'est un bien bel endroit que ce petit square en bordure de la D320. On ne peut pas rater "Le Renard et la Cigogne" ! Ils sont là, taillés dans le granit.
Compère le Renard se mit un jour en frais,
et retint à dîner commère la Cigogne.
Le régal fût petit et sans beaucoup d'apprêts :
Le galant pour toute besogne,
Avait un brouet clair ; il vivait chichement.
Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
La Cigogne au long bec n'en put attraper miette ;
Et le drôle eut lapé le tout en un moment.
Pour se venger de cette tromperie,
A quelque temps de là, la Cigogne le prie.
"Volontiers, lui dit-il ; car avec mes amis
Je ne fais point cérémonie. "
A l'heure dite, il courut au logis
De la Cigogne son hôtesse ;
Loua très fort la politesse ;
Trouva le dîner cuit à point :
Bon appétit surtout ; Renards n'en manquent point.
Il se réjouissait à l'odeur de la viande
Mise en menus morceaux, et qu'il croyait friande.
On servit, pour l'embarrasser,
En un vase à long col et d'étroite embouchure.
Le bec de la Cigogne y pouvait bien passer ;
Mais le museau du sire était d'autre mesure.
Il lui fallut à jeun retourner au logis,
Honteux comme un Renard qu'une Poule aurait pris,
Serrant la queue, et portant bas l'oreille.
Trompeurs, c'est pour vous que j'écris :
Attendez-vous à la pareille.
Livre I - Fable XVIII - Jean de La Fontaine
Voici une étape du circuit FABULIS qui a conservé tout son attrait ! Après toutes ces visites, il va falloir que je redessine un circuit des étapes encore "présentables"...Je continue à cheminer au long de la vallée entre la Marne à main droite et le vignoble de Champagne à gauche. A Trélou sur Marne, je vais visiter un lavoir décoré d'une mosaïque. Facile à trouver, il est hélas fermé au public, ce qui a peut-être contribué à le conserver en bon état. J'arrive malgré tout à photographier l'oeuvre dédiée au Héron : Un jour, sur ses longs pieds, allait, je ne sais où,
Le Héron au long bec emmanché d’un long cou (...)
C'est de la bien belle ouvrage, je parle autant de ces deux alexandrins que de la mosaïque. La céramiste, Madeleine Cocteau, mérite d'être citée, ce splendide Héron a en effet magnifiquement résisté à l'épreuve du temps.
Quel dommage de devoir le mettre en cage... Après avoir dédaigné la Carpe et le Brochet, la Tanche et le Goujon, notre Héron dut se contenter d'un Limaçon pour tout repas. "On hasarde de perdre en voulant trop gagner."
Cette morale est encore d'actualité... L'arrêt suivant, je dois le faire dans ce village après avoir quitté la vallée de la Marne.
La cognée géante qui illustrait la fable "La forêt et le bûcheron" a disparu même s'il reste encore quelques bûches. Je ne m'attarde pas et reprends la route pour de découvrir un lieu de mémoire de la Première guerre mondiale que je ne connaissais pas. A la fin du mois de juillet 1918, les soldats américains de la 142ème division durent reprendre cette ferme de la Croix Rouge. Sur cette terre picarde, les pertes furent lourdes et permirent d'arrêter l'offensive allemande vers Paris.
Mais je dois continuer mon périple vers la prochaine fable. Ici, j'ai un peu de mal à dénicher le lavoir et la fable. Pourtant, c'est la plus célèbre poésie de La Fontaine qui y est illustrée. Pas facile à identifier de prime abord : un vitrail réalisé à partir d'un dessin des enfants de l'école de du village, et une fontaine installée dans le bassin du lavoir. L'eau devait "jacasser en ricochant de feuille en feuille". Ce n'est plus le cas. "Apprenez que tout flatteur vit au dépens de celui qui l'écoute..." Et oui, c'est du Corbeau et du Renard qu'il s'agit. Ce n'est pas, à mon avis, la plus belle réalisation de ce Labyrinthe fabuleux même si, lorsque la fontaine était en service, cela devait avoir plus de style.
Les routes sont vallonnées et calmes : seul au monde... Après avoir dû suivre une déviation à cause d'une route en travaux, me voici à proximité d'une des anciennes "Maison des fables" située dans le petit village de Cohan. Dans un premier temps je ne localise pas cette fameuse Maison, alors je pars à la découverte du lavoir. C'est par un petit chemin que j'y arrive après avoir franchi un ruisseau. Le lavoir est de belle facture mais je pense aux femmes qui devaient venir à ce lavoir pour faire leur lessive. Quelle expédition pour arriver ici ! ... et un fagot à droite, pour illustrer une fable que je ne connaissais pas : la Mort et le Bûcheron. La voici :
Un pauvre Bûcheron tout couvert de ramée,
Sous le faix du fagot aussi bien que des ans
Gémissant et courbé marchait à pas pesants,
Et tâchait de gagner sa chaumine enfumée.
Enfin, n'en pouvant plus d'effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe à son malheur.
Quel plaisir a-t-il eu depuis qu'il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impôts,
Le créancier, et la corvée
Lui font d'un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la mort, elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu'il faut faire
C'est, dit-il, afin de m'aider
À recharger ce bois ; tu ne tarderas guère.
Le trépas vient tout guérir ;
Mais ne bougeons d'où nous sommes.
Plutôt souffrir que mourir,
C'est la devise des hommes.
Livre I , Fable 16
Mais ce n'est pas tout, une fresque sur mosaïque a été réalisée au fond du bassin. Pas très concluant tout ça. Heureusement l'endroit est bucolique.
En revenant vers le village, je découvre que la maison des fables était l'église du village. Monument imposant, cette église désacralisée fut un des lieux de rendez-vous des Fables. Hélas la vétusté du bâtiment ne permet plus d'y entrer. Le patrimoine français n'est décidément pas en bonne santé. Dernière étape de ma randonnée, je ne verrai pas grand chose à Collonges. En effet, le lavoir du village est fermé à double tour et s'il abrite toujours la fable "Le Chêne et le Roseau", je n'en verrai rien !
Point final de mon voyage au pays de Monsieur de La Fontaine, il me reste à parcourir une cinquantaine de kilomètres pour rentrer et rédiger ce billet, ce qui me prit vraiment beaucoup de temps...
Merci beaucoup pour cette ultime sortie sur pas du fabuliste....
RépondreSupprimerLa fraîcheur des lavoirs est bien agréable...
On a patienté jusque là, mais bon...
Tout vient à point
À qui sait attendre...
Bonne continuation...
Bonsoir
SupprimerOui, je ne suis pas aussi assidu que je le voudrais et en plus j'ai eu quelques petits problèmes avec Blogger. Merci pour ta fidélité ! A bientôt.